Space anomaly remains, wellness mysteries faint. Likely the uncause caused low memory
Emile Barret, Céline Burnand, Camille Lichtenstern, Sébastian Verdon & Baker Wardlaw
14.05 - 04.06.16

Pour cette exposition, il a été demandé aux artistes Camille Lichtenstern, Emile Barret, Céline Burnand, Sébastien Verdon et Baker Wardlaw de réfléchir à une capsule que l’on enverrait dans l’espace. A l’ère des visites sur Mars, de la découverte de nouvelles planètes, l’humanité qui occupe la terre (un espace fini) cherche de nouvelles possibilités dans l’infini. Cette capsule peut donc fonctionner doublement: d’une part comme une bouteille à la mer interstellaire, envoyée au hasard donnant une vision partielle de l’humanité, évocatrice, porteuse d’imaginaire à travers les oeuvres d’art, ou d’autre part comme une forme de testament pré-apocalyptique, un monument à la terre, une forme de mémoire destinée aux archéologues du futur, qui serait portée par ces cinq artistes.

L’espace de la galerie fonctionnera comme ersatz de la capsule. A travers une telle exposition, plusieurs réflexions s’engendrent: notamment autour du rôle de l’art dans de telles circonstances (l’envoi du vinyle voyager est très intéressant à cet égard), aux questions de patrimoine, de mémoire (comme système discriminatoire qui doit sélectionner), d’archéologie (envoi de la capsule dans l’espace pour le futur, les artistes créent ainsi une forme de passé), de conservation et d’ethnologie.

Les réflexions autour de la capsule temporelle sont liées à des questions autour de la conservation. Nous sommes entrés ans une ère incertaine face au climat, aux mouvements sociaux, politiques, géopolitiques, économiques etc., ce qui semble entraîner une forme de crispation autour de notre patrimoine. Le transhumanisme (mouvement né aux Etats Unis visant le but de transférer la mémoire et le cerveau humain sur une machine afin de se rendre immortel) témoigne de la volonté de rendre l’homme éternel face à l’adversité de la fatalité. Les banques de données pullulent autour de la planète, l’on y conserve les données végétales, humaines, animales et informatiques. Les anciens bunkers de l’armée suisse sont réaffectés en coffre fort de données numériques. L’on injecte une certaine somme pour la sauvegarde d’espèce alors que la sixième extinction de masse a commencé (des chercheurs de l’université de Stanford, Princeton et Berkeley ont conclu dans un rapport dans lequel ils estiment que plus d’espèces s’éteignent de manière plus rapide). Tout nous file entre les doigts et l’on tente tant bien que mal de rattraper, de figer le monde. La manière dont on procède pour figer les éléments qui semblent nous échapper est très intéressante: un objet du quotidien en est arraché pour entamer une lente descente dans les archives souterraines et inaccessibles.

Paradoxalement cet acte de mémoire, de sauvegarde peut être une tentative de détachement d’effacement (O.Debary). L’espace muséal est un exemple paradigmatique de la conservation, il possède des collections et travaille sur la conservation d’un patrimoine. Mais par définition le musée est un espace séparé du quotidien des gens, l’accès y est pour la plupart du temps payant, les collections ne sont visibles que lors d’expositions sur des thématiques particulières. Les banques de données de conservation sont à cet égard totalement fermées au grand public, le zoo est un espace où l’accès est également payant et où l’on ne se rend pas forcément chaque semaine. Tous ces espaces de conservation sont donc très éloignés du quotidien. Finalement est-ce que ces lieux de mémoire ne sont pas des lieux d’oubli? Des lieux que l’on sait sécure et dont on peut alors se détacher. Le travail de mémoire serait alors un travail de séparation.

La capsule temporelle cristallise selon moi toutes ces questions. Il s’agirait de réfléchir avec les artistes aux différentes problématiques que j’ai évoquées ci-dessus pour tenter de comprendre les rapports de la société avec sa propre mémoire. Evidemment il s’agit là d’une extrapolation de notre rapport à la conservation; l’espace stellaire est l’endroit le plus séparé de notre société, comme si le plus loin semblait le plus sécurisé aussi.